ਧੰਨੁ ਸੁ ਕਾਗਦੁ ਕਲਮ ਧੰਨੁ ਧਨੁ ਭਾਂਡਾ ਧਨੁ ਮਸੁ ॥

dhan so kāgad kalam dhan dhan bhānḍā dhan mas.

Béni soit le papier, et béni soit le calame ; béni soit l’encrier, et bénie soit l’encre ;

ਧਨੁ ਲੇਖਾਰੀ ਨਾਨਕਾ ਜਿਨਿ ਨਾਮੁ ਲਿਖਾਇਆ ਸਚੁ ॥੧॥

dhan lekhārī nānkā jin nām likhāiā sach. |1|

béni soit l’écrivain, ô Nānak, qui écrit ainsi le vrai Nām. |1|

Gurū Nānak Dev (SGGS p.1291)

La gurmukhī, l'alphabet des Sikhs

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Sans doute à l’instigation de son maître, Gurū Nānak, Gurū Angad, son successeur, a créé un nouvel alphabet pour rompre avec le cadre contraignant et religieusement très marqué de la devanāgarī, alphabet habituel du sanskrit, et pour transmettre le plus fidèlement possible son enseignement. Pour cela, Gurū Angad s’inspire du landā, un alphabet informel très répandu au sein de la caste des marchands dont il est issu.

Ce nouvel alphabet, la gurmukhī, transcrit toutes les sonorités des langues populaires du Pendjab, donc des hymnes du Gurū. Dès lors, la gurmukhī permet de « fixer » les compositions de Gurū Nānak qui sont chantées ou récitées quotidiennement car considérées comme les textes de références de l’enseignement: ce sont notamment le Jap Jī Sāhib, l’Ārtī, le So Dār, ou encore l’Āsā dī Vār. On évite ainsi leurs transformations fortuites ou volontaires inévitables dans une transmission orale, d’autant plus que les brahmanes exercent une pression constante pour que ces textes valident l’orthodoxie hindoue.

Gur-mukhī signifie « face au Gurū » ou « de la bouche même du Gurū », indiquant par-là que cette écriture est celle qui rend le plus fidèlement possible la parole même du Gurū; elle est une composante essentielle de la connexion mystique qui existe entre le Gurū et chacun·e des Sikhs. La gurmukhī devient rapidement le vecteur d’un enseignement spirituel qui entend s’adresser à tous, et un instrument supplémentaire au service d’une « culture spirituelle sikhe » indépendante.

La gurmukhī est donc l’alphabet, ou plus exactement, l’alphasyllabaire, dans lequel ont été écrits les textes sacrés sikhs, le Srī Gurū Granth Sāhib et le Dasam Granth Sāhib. En Inde, elle sert aussi à transcrire le pendjabi moderne (langue parlée au Pendjab indien et pakistanais) et très répandue au sein des communautés pendjabies dans le monde, parmi les Sikhs notamment.

Comme l’écriture latine, la gurmukhī s’écrit horizontalement, de gauche à droite. Elle ne fait pas de distinction entre majuscules et minuscules. Comme beaucoup d’écritures nord-indiennes, elle est reconnaissable à la ligne horizontale continue sous laquelle sont « accrochés » les caractères. Cette ligne s’interrompt brièvement pour cinq caractères ouverts en haut. Elle s’interrompt aussi entre les mots sauf dans certains manuscrits où elle peut lier plusieurs mots voire des phrases entières d’affilée. Dans l’écriture manuscrite, elle est tracée après avoir écrit un mot en entier. Elle s’interrompt toutefois entre les mots. La calligraphie de la gurmukhī s’appelle akharkārī, « l’art des lettres », et sa prononciation juste s'appelle santhīā.

Octobre 2021 - par Ram Singh

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